Portrait Nina, éducatrice

Educatrice, un boulot d’aventurier

Je travaille à la Sauvegarde de l’Enfance 44, dans la Protection de l’Enfance, sur un Service d’Accueil Familial. Je suis éducatrice spécialisée. J’ai 29 ans. L’animation a été un élément déclencheur. Je me suis rendu compte que les jeunes qui aimaient un peu sortir du cadre m’intéressaient un peu plus. Ils me poussaient à aller plus loin, à mobiliser d’autres choses. Et c’est ce qui me motivait.
J’ai décidé que je voulais devenir éducatrice spécialisée lors, justement, d’une expérience en tant qu’animatrice. J’étais venue, comme ça, en renfort. C’était un séjour en partenariat PEP44-CEMEA 44-Sauvegarde de L’Enfance 44. J’ai eu le coup de foudre pour le public. Je me suis dit « OK, clairement, j’ai envie de bosser avec eux. J’ai envie de les connaître différemment ». Je crois que je suis réceptive à leur détresse. ça ne me touche pas à me faire mal. ça me touche à m’intéresser.

Quand j’ai passé les concours pour entrer en formation, on m’a demandé ce que c’était pour moi que d’être éducatrice et j’ai répondu que c’était être avec une équipe. Sans équipe, je ne pourrais jamais être éducatrice. Ce qui m’a rassurée c’est que je suis arrivée dans une équipe où chaque personne individuellement a voulu m’accueillir, comprendre qui j’étais en tant que professionnelle et a essayé de m’apporter un peu de son expérience. Et tous les jours j’apprends un peu plus.
Ce qui m’a sauté au visage, pendant ma formation, au CFPES CEMEA d’Aubervilliers, c’était mon incapacité à être en relation éducative avec un jeune si on ne partage pas quelque chose ensemble. Ce que je veux c’est pouvoir vivre des moments avec les jeunes. Ces moments de vie quotidienne, d’activité, où je peux ressentir ses difficultés, ses capacités. Je me suis rendu compte que j’avais vraiment besoin que le jeune soit libre, que moi aussi je le sois. Si je n’avais pas eu cette liberté-là, je crois que j’aurais arrêté parce qu’écrire sur des jeunes que je ne connais pas c’est vraiment pas possible pour moi.

La question des responsabilités et de l’autonomie, ce n’est pas quelque chose qui m’effraie. Mon parcours scolaire, notamment au lycée Expérimental de Saint-Nazaire, m’a amenée à développer un certain sens de l’autonomie. Les deux années passées à coordonner des projets autour du handicap et de l’international, aux CEMEA Pays-de-la-Loire, ont fait que je me suis sentie assez tôt capable d’assurer cette fonction-là. Capable et armée.
Je suis armée pour aller dans plein d’endroits. Je le suis grâce à des personnes qui sont venues à des moments me dire « Tu vois que tu es capable de le faire ». Elles m’ont poussée à aller au-delà des limites que je pensais avoir, de moi-même, en fait. A mon tour, peut-être, à petite échelle, à ces enfants, qui vont me croiser deux mois, deux ans, ou peut-être vingt, il y a des moments où je vais pouvoir leur dire que je crois en chacun d’entre eux. Même quand ils jouent avec la confiance que je leur donne, je continue à croire en eux. Sincèrement. J’espère qu’ils vont l’entendre et se rendre compte qu’ils peuvent faire quelque chose.

J’aime le défi. Je n’aime pas me lever le matin en sachant ce qui va se passer dans ma journée. Ils viennent assouvir cette soif d’imprévu. Avec eux, je ne m’ennuie jamais.
C’est un boulot d’aventurier, je trouve.

Nina, éducatrice,
25 septembre 2015 - Nantes